Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/204

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vant eux, assurant que par là ils obtiennent de la clémence de leurs dieux la fertilité de la terre.

LXVI
De quelques moines idolâtres.


On trouve en ce pays-là plusieurs moines dévoués au service des idoles ; ils ont un grand monastère de la grandeur à peu près d’un village, contenant environ deux mille moines, qui vivent au service des idoles, étant habillés et rasés d’une manière différente des autres. Car ils se rasent la tête et la barbe et portent un habit religieux ; leur occupation est de chanter, ou plutôt de beugler, aux fêtes des idoles ; ils allument plusieurs cierges dans le temple et font plusieurs autres cérémonies ridicules et extravagantes. Il y a en d’autres endroits d’autres moines idolâtres, dont quelques-uns ont plusieurs femmes ; d’autres gardent le célibat à l’honneur de leurs dieux et mènent une vie austère, car ils ne mangent rien que du son bouilli dans l’eau. Ils sont aussi vêtus de bure de couleur obscure ; ils couchent sur des planchers fort froids. Cependant les autres moines, qui mènent une vie plus relâchée, regardent comme hérétiques ceux qui mènent une vie si austère, disant qu’ils n’honorent point Dieu comme il faut[1].

  1. Il s’agit ici des bonzeries de toute espèce qui pullulèrent toujours dans le vaste empire asiatique, dont elles sont des plaies en quelque sorte normales : car l’innombrable population qu’elles contiennent non seulement est improductive, mais vit des superstitions qu’elle entretient dans le peuple et attire à elle des richesses considérables. À plusieurs reprises les empereurs ont essayé de détruire les bonzeries, mais sans jamais y réussir.