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du blé. Ils font du pain de riz. Ils n’ont point de vignes non plus, mais ils tirent une boisson de certains arbres de la manière suivante. Il y a en ce pays-là beaucoup d’arbres qui n’ont que quatre branches (sorte de palmiers), lesquels ils coupent dans une certaine saison de l’année et dont il sort une liqueur qu’ils ramassent. Elle coule en si grande abondance que dans un jour et une nuit ils peuvent remplir du flux d’une seule branche une cruche ; après quoi ils en emplissent une autre, jusqu’à ce que la branche ne coule plus, et c’est là leur vendange[1]. Ils ont un moyen de rendre ce flux plus abondant par les arrosements des eaux, qu’ils répandent sur les racines de l’arbre lorsqu’il pleure trop lentement ; mais alors cette liqueur n’est pas si agréable que lorsqu’elle coule naturellement. Ce pays est aussi très abondant en noix d’Inde (cocos).

XVII
Du royaume de Dragoiam.


Les hommes de ce royaume sont pour la plupart très sauvages ; ils adorent les idoles et ont un langage particulier et un roi. Ils ont une coutume parmi eux qui est que quand quelqu’un est malade, ses amis et ses parents assemblent les magiciens et les enchanteurs, pour leur demander si le malade en réchappera ; et ceux-ci répondent ce que les démons leur suggèrent. S’ils disent qu’il n’en réchappera pas, ils ferment la bouche du patient pour lui empêcher la respiration ; et ainsi le font mourir, pour qu’il ne meure pas de maladie. Puis ils dépècent sa chair, la cuisent et la mangent, et ce sont les parents et les meilleurs amis qui font cette horrible action. Ils disent pour leurs raisons que si sa chair pourrissait, elle serait convertie en vers, et que ces vers enfin, ne trouvant plus à se repaître sur son

  1. Chacun a entendu parler du vin de palmier, boisson très agréable et très capiteuse.