Page:Marco Polo et al. - Deux voyages en Asie au XIIIe siècle, 1888.djvu/67

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sans le su et la permission de Mangu-Khan ; de sorte qu’il était nécessaire que mon truchement et moi l’allassions trouver, et que mon compagnon, avec notre garçon, retourneraient vers Sartach ; pour attendre notre retour. Alors mon bonhomme de truchement se mit à pleurer et se plaindre, se tenant comme perdu. D’un autre côté mon compagnon protestait qu’il se laisserait plutôt tuer que de se séparer de moi. Je dis aussi que je ne pouvais pas aller sans lui, et que nous avions bien besoin de deux serviteurs avec nous ; que s’il arrivait qu’un de nous devînt malade, je ne pourrais pas demeurer seul. Notre truchement retourna à la cour, et rapporta le tout à Baatu, qui commanda que les deux prêtres, à savoir mon compagnon et moi, allassions ensemble, avec notre interprète, et que le clerc retournât vers Sartach. Cela nous étant rapporté, je voulais insister pour notre clerc aussi, afin qu’il vînt avec nous ; mais le truchement me dit qu’il n’en fallait pas parler davantage, puisque Baatu l’avait ainsi ordonné, et qu’il n’oserait plus retourner à la cour pour cela. Pour le clerc, nommé Goset, il avait eu seulement vingt-six pièces de monnaie par aumône, et rien de plus : il en retint dix pour lui et pour son garçon, et les autres seize nous furent apportées par le truchement. Nous nous séparâmes de la sorte, avec force larmes de par et d’autre, lui s’en retournant vers Sartach, et nous demeurant là pour achever notre voyage.


XXII


De notre voyage à la cour de Mangu-Khan.


Notre clerc retourna à la cour de Sartach, où il arriva la veille de l’Assomption, et le lendemain les prêtres nestoriens ne manquèrent pas de se revêtir de nos ornements sacerdotaux, en la présence de Sartach, ainsi que nous sûmes depuis. Pour nous, on nous fit aller en un autre logement, où on devait nous pourvoir de vivres et de chevaux ; mais d’autant que nous