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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes,2.djvu/14

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nablement au speech de circonstance, nous remontâmes à cheval. À six heures, nous avions laissé derrière nous Lucre et Andahuayllillas, villages renommés pour les bayetas et les bayetones[1] qu’y fabriquent des vieillards des deux sexes. L’Angelus sonnait comme nous entrions à Huaro. Nous devions nous y arrêter pour passer la nuit et donner aux muletiers chargés de nos bagages le temps de nous rejoindre.

Huaro, que les chartes péruviennes qualifient de ville, n’est qu’un grand village aussi triste que mal bâti. On y compte néanmoins six maisons en pierre et une église à clocher carré, dont l’orgue est, dit-on, remarquable. Comme il faisait nuit et que l’église était fermée, je ne pus voir que son clocher, surmonté d’une girouette.

Nous étions descendus chez un des notables de l’endroit, qui, ayant entendu parler de l’appétit des voyageurs et supposant que nous tombions d’inanition, fit égorger, bouillir et fricasser en moins d’une heure tous les poulets, canards et cochons d’Inde que ses gens purent réunir. Sa surprise fut grande, lorsqu’il nous vit toucher à tout cela du bout des dents, et comme il crut que nous en agissions ainsi par dédain pour sa table, ou pour le talent de sa cuisinière, il prit un air pincé en nous priant d’excu-

  1. Étoffes de laine grossière à l’usage du peuple.