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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes,2.djvu/19

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hautes régions. Ce déjeuner, fait en trottant, économisait une halte et nous donnait, au dire des arrieros. une chance de plus d’arriver avant la nuit à Lauramarca. Mais nous avions compté sans le soleil, qui s’éclipsa complétement sur les deux heures de l’après-midi, et sans la neige qui, tombant à flocons pressés, eut bientôt recouvert le sol d’un tapis uniforme ; pour surcroît d’infortune, nous cheminions debout au vent et nous ne tardâmes pas à nous rencontrer nez à nez avec la tempête. Le choc fut terrible. Nous fîmes néanmoins bonne contenance, et courbés en deux, accrochés à nos selles, nous continuâmes d’avancer, malgré la foudre et les éclairs qui nous aveuglaient, la neige et les grêlons qui nous fouettaient le visage. Cette tempête dura jusqu’à quatre heures, puis la neige cessa de tomber, le ciel s’éclaircit et le soleil brilla de nouveau sur nos têtes. Comme nous allions remercier Dieu de nous avoir tirés de danger, les arrieros, qui nous précédaient, lâchèrent un juron formidable. Ils venaient de s’apercevoir qu’ils faisaient fausse route. Les plus expérimentés d’entre eux essayèrent de s’orienter, tandis que les plus novices les regardaient faire. La chose était difficile sans doute, car au bout d’un quart d’heure de pourparlers et de tâtonnements, les premiers en étaient encore à chercher la bonne voie. Sur ces entrefaites, un Chasqui, que j’ai toujours soupçonné d’être la Providence en personne, parut à cent pas