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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/132

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tacle sans avoir à dépenser un centado. » Pendant qu’il m’entretenait de la sorte, sa fille s’était avancée en se balançant sur ses hanches, et, tout en chantonnant entre ses dents, me regardait d’un air si cavalier, que, par réserve, monsieur, je crus devoir baisser les yeux.

Comme le service que le titiretero réclamait de moi n’avait rien qui blessât l’honneur ou la morale, et que je me sentais plus d’intelligence qu’il n’en fallait pour remplir convenablement le rôle qu’il me destinait, je lui promis de songer à sa proposition, et revins à l’hospice, enchanté d’avoir trouvé un moyen de satisfaire mon goût naissant pour le théâtre, et cela sans bourse délier. Restait à obtenir un permis de sortie journalier, ce qui me fut facile, vu qu’à l’heure des représentations j’avais terminé ma journée de travail et pouvais m’absenter une couple d’heures sans que le service en souffrît. J’allai donc au théâtre, où quelques leçons du titiretero et de sa fille, qu’il appelait Torcola, m’eurent bientôt mis à même de les seconder dignement. Quand le bonhomme me vit bien au courant du répertoire dramatique, il se reposa sur sa fille et sur moi de la conduite du théâtre, pendant que lui-même s’installait à la porte, où, tout en fumant sa pipe et vidant sa bouteille, il recevait l’argent du public. Une fois les curieux entrés, la salle remplie et la représentation commencée, il emportait la caisse dans ses po-