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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/136

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« Le soir venu, le titiretero me prit à l’écart : Écoute, me dit-il, Torcola m’a tout conté ; à présent que te voilà de la famille, il est inutile de se gêner plus longtemps avec toi. Jusqu’à cette heure, tu n’as vu en nous que des joueurs de marionnettes ; il est temps de te révéler notre véritable profession. Tu as peut-être entendu parler de la société du Carisal[1]. (J’avouai au titiretero que pareille société m’était tout à fait inconnue.) Sache alors, me dit-il, que c’est une réunion de braves gens, tous nés avec des dispositions commerciales, mais qui, faute d’un capital suffisant pour faire le commerce en grand, sont obligés de tirer à vue sur la bourse d’autrui pour s’en former un. J’appartiens à cette estimable corporation. Par ordre d’el Tunante, notre illustre chef, j’ai quitté les environs de Lima, où la société s’augmente chaque jour de nouvelles recrues, et je suis venu pousser une reconnaissance dans ce pays hospitalier. Tu peux m’être d’une grande utilité, tant par la connaissance des localités que tu possèdes, que par les renseignements exacts que tu dois être à même de me fournir sur la fortune des individus. Quant au moyen d’introduction, tu n’as pas à

  1. Bande de voleurs qui infestèrent pendant longtemps le pays compris entre Lima et Callao, où ils épiaient le passage des voyageurs et des diligences, cachés dans les champs de roseaux (carisales) qui bordaient à cette époque les deux côtés de la grand’route.