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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/151

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objets qui se trouvent à leur convenance. L’an dernier, ces pauvres dames furent dépouillées de deux couverts d’argent et d’une timbale en vermeil. Vous comprenez…

— Je comprends parfaitement, señor Tamal ; mais vous ne m’avez pas encore dit le nom des personnes chez lesquelles vous allez m’introduire.

— Elles en ont deux, me répondit-il ; un nom de famille qu’elles ne portent plus, et un apodo ou nom de guerre qu’elles portent.

— Un nom de guerre ! qu’entendez-vous par là ?

— Je vais vous le dire, monsieur : ces dames sont trois sœurs, filles d’un vieil escribano d’Aréquipa qui mourut en les laissant dans la misère ; comme elle n’avaient aucun moyen d’existence et que leur grande beauté, jointe à l’isolement dans lequel elles vivaient, leur attirait journellement des hommages profanes, le démon en profita pour leur tendre des piéges : mais elles surent déjouer les ruses du malin, et la récompense de leur honnêteté fut plus tard une jolie fortune, qui leur vint d’héritage, comme elle me l’ont assuré bien des fois. Or, c’est précisément pour jeter des doutes sur la source de cette fortune, que les méchants et les envieux affectèrent de retirer à ces dames le nom de Salcedo, qui était celui de leur père, pour ne les appeler que las Cagaluchas. On a continué à leur donner ce nom bizarre, et par une aimable tolérance, elles ont fini