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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/192

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tracta à la seconde bouchée. Une question que mes hôtesses débattaient à voix basse depuis quelques minutes les empêcha de remarquer mon peu de sympathie pour la friandise conventuelle, et la promptitude avec laquelle je l’éloignai de moi.

Cependant la discussion entre ces dames s’échauffait de plus en plus, et bien que, par discrétion, j’essayasse de faire la sourde oreille en regardant les solives du plafond de l’air d’un poëte en quête d’une rime, le mot vihuela, plusieurs fois répété, finit par attirer mon attention. Bientôt, la proposition émise par une des fillettes, d’envoyer un exprès au pueblo voisin pour en ramener quelques couples d’humeur folâtre, acheva de m’éclairer sur les intentions de ces dames. Il ne s’agissait rien moins que d’un divertissement chorégraphique qu’on essayait d’organiser en mon honneur, et auquel, sans nul doute, j’allais être appelé à prendre une part active. L’idée de passer la nuit à danser le maicito ou la samacueca, quand mes jambes ployaient de lassitude et que j’avais à repartir au point du jour, m’effraya tellement, qu’un changement notable s’opéra tout à coup dans ma physionomie. Ces dames, l’ayant remarqué, voulurent en savoir la cause. Je leur avouai sans détour que le repas copieux que je venais de faire, joint à la fatigue de la journée, me donnait une irrésistible envie d’aller me mettre au lit. En faisant cet aveu, j’avais traîtreusement