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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/218

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des neiges. Entre Yura et Jésus, sites parfaitement arides, mais très-renommés, le premier pour ses bains sulfureux, le second pour ses eaux minérales, nous trouvâmes une pascana[1], vaste enceinte carrée au centre de laquelle quelques centaines de moutons étaient réunis. Un mur de deux pieds de hauteur, formé d’éclats de granit juxtaposés, fermait ce bercail primitif. Le pasteur, jeune gars d’une quinzaine d’années, vêtu de haillons et coiffé d’un bonnet de police, dormait étendu au soleil, laissant à deux roquets le soin de garder son troupeau. Aux sourds grognements que ces animaux firent entendre à notre approche, le dormeur s’éveilla et nous nous saluâmes réciproquement. Quelques fromages mous, fruits de ses loisirs, qu’il nous montra avec une certaine défiance et que je lui payai trois fois leur valeur, le mirent dans des dispositions excellentes à notre égard ; j’en profitai pour lui marchander un agneau, qu’après quelques difficultés il consentit à vendre et que Pacheco se chargea de choisir. L’animal, attaché par les jambes, fut suspendu au bras du mozo en manière de cabas, et nous quittâmes la pascana, salués par les bénédictions du pasteur et les aboiements de ses chiens, dont l’humeur, aigrie par une faim constante, me parut des plus revêches.

Nous poursuivîmes notre marche, obliquant in-

  1. Du verbe quechua pascani, paître.