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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/237

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avalé quelques cuillerées, je pus me convaincre qu’un jeûne de douze heures, loin d’affaiblir chez moi l’économie de l’appareil gastrique, l’avait exaltée au contraire à sa quatrième puissance.

Au potage succéda bientôt un gigot braisé dont le fumet se répandit dans l’appartement. À la vue de ce morceau mirifique entouré de pommes de terre, ma faim assoupie, mais non apaisée, se réveilla avec une nouvelle ardeur ; et, sans perdre de temps, je coupai une large tranche du gigot, que je glissai dans mon assiette avec addition convenable de tubercules. Ce mets, déjà substantiel par lui-même, me parut plus nourrissant encore, quand je l’eus arrosé de quelques verres d’un vin de Moquehua, dont la qualité supérieure donnait un nouveau prix à l’hospitalité de M. Reegle.

Comme j’en absorbais une dernière rasade, le pongo, qui s’était éloigné, reparut muni d’un plateau qu’il déposa devant son maître. Ce plateau supportait une théière, un bol, une bouteille à cachet rouge, et un livre format in-12, que je reconnus sur-le-champ pour celui dans lequel mon hôte lisait au moment de mon arrivée. Tandis que ce dernier se versait du thé, le pongo débouchait la bouteille ; M. Reegle la prit et mêla à son eau chaude quelques gouttes du rhum qu’elle contenait.

« Tel est mon ordinaire de chaque jour, me dit-il après avoir avalé une gorgée de ce breuvage, et