Aller au contenu

Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/241

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

posai ma tête sur l’oreiller et m’endormis bientôt d’un sommeil profond.

Un peu avant l’aurore, l’Indien, fidèle à la consigne que je lui avais donnée, entrait chez moi, tirait brusquement les rideaux du lit et promenait une bougie devant mes yeux, sous prétexte que quatre heures allaient sonner et qu’il était temps de me mettre en route. Je procédai incontinent à ma toilette ; et, tout en chaussant mes éperons, je préparai un petit speech de circonstance, que je comptais adresser à mon hôte au moment de me mettre en selle. Après m’être assuré par deux ou trois répétitions de la fidélité de ma mémoire, je me dirigeai vers le comedor, où, selon sa promesse, M. Reegle devait m’attendre. En ouvrant la porte, je ne pus retenir un cri de surprise. Le digne insulaire m’attendait en effet, mais, comme on dit vulgairement, les coudes sur la table. À la clarté de deux bougies aux trois quarts consumées, l’infortuné dormait d’un sommeil léthargique, le visage enfoui dans son bol, un de ses bras étendu vers la théière renversée, l’autre vers un trio de bouteilles vides. En vain, pour l’avertir de ma présence, je toussai fortement et culbutai même une chaise, son sommeil n’en fut point troublé ; j’eus alors recours aux moyens héroïques, et, frappant la table du poing, je me penchai vers le dormeur et lui criai son nom dans l’oreille : sa seule réponse fut un grognement inarticulé. Comme le pe-