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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/244

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rades que Pacheco distribua, comme appoint de la somme, aux plus récalcitrants, on parvint à nous procurer deux cochons d’Inde et une poignée de pommes de terre, que la femme du gobernador fit frire dans le suif. Nous eûmes, pour arroser ce triste repas, une aigre boisson fabriquée par économie avec les tiges du maïs, laquelle me parut être à la chicha de grain ce que la rinçure d’une bouteille est au jus de la grappe.

À deux lieues de Juliaca, mon guide me montra à notre gauche, enfoui dans un pli du terrain, le village d’Atuncolla, célèbre par les tapis velus que fabriquent ses habitants depuis un temps immémorial. Comme j’avais déjà vu maints échantillons de cette industrie dans les villes de la sierra et que, sous le triple rapport de la couleur, du dessin et du tissu, elle m’avait toujours paru des plus ordinaires, je donnai à peine un regard au pueblo manufacturier, qui ne tarda pas à s’évanouir dans la perspective.

La lagune d’Atuncolla, que nous côtoyâmes à peu de distance, dissipa par l’antiquité de ses souvenirs l’impression de froideur que m’avait laissée son village. C’est dans cette lagune, dont la circonférence est de quatre lieues, que s’élevait jadis le palais du Grand-Colla (atun colla), chef de la puissante nation des Collahuas. Cet édifice, de figure triangulaire, occupait le centre d’une île située à quelques encablures du rivage et communiquait avec ce