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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/257

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tre elles, pour charmer les ennuis de l’attente, s’étaient munies de cruchons de chicha et de bouteilles d’eau-de-vie, auxquels elles buvaient à même, tout en mâchonnant des feuilles de coca, qu’elles puisaient dans une aumônière pendue à leur côté.

Bientôt les cris proférés par des milliers de voix, et le mouvement de recul imprimé à la foule, nous annoncèrent l’arrivée de la procession. Les cloches, qui s’étaient tues, recommencèrent à sonner, tandis que les camaretos et les pétards éclataient de plus belle. Au même instant, je vis briller à l’extrémité de la rue, au-dessus des têtes de la multitude, les hampes dorées des drapeaux et la croix d’argent haute de quelques mètres. Devant le signe du salut, j’obligeai M. Saunders à retirer son feutre, bien qu’il prétendît que le coryza dont il était affecté, joint à sa qualité de protestant, étaient des motifs suffisants pour ne pas l’ôter.

En tête du cortége, parut un détachement de serenos ou gardes de police, composé d’une douzaine d’hommes, vêtus de ponchos de laine, coiffés de monteras et chaussés d’usutas (lambeau de cuir façonné en sandale) ; chacun d’eux était armé d’une macana noueuse en bois de huarango, retenue au poignet par un bout de corde. Ce gourdin, auquel ils imprimaient un mouvement continuel, leur servait à contenir dans de justes bornes l’empressement des indigènes, exaltés outre mesure par des li-