Aller au contenu

Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

péruviens s’y étaient donné rendez-vous de cent lieues à la ronde, et l’installation de leurs domiciles temporaires prêtait à la localité une physionomie assez pittoresque. Des bannes rayées, des tentures, des draps de lit, soutenus par de longues perches d’où pendaient des banderoles aux couleurs nationales, cachaient entièrement les murs et les toits des chaumières. La grande place, métamorphosée en champ de foire, présentait sur ses quatre faces une double ligne d’ajoupas, de niches et de paravents, qui tenaient lieu de boutiques, et devant lesquels se pressait une foule compacte d’acheteurs et de curieux. Au centre de cette place, des marchands de gâteaux, des glaciers, des fruitiers, des vendeurs de chicha et d’eau-de-vie avaient dressé leurs éventaires — une serviette étendue à terre — et criaient leurs marchandises sur tous les tons. Des banquiers ambulants promenaient leur roulette à travers la foule et provoquaient les amateurs au jeu du monte en faisant luire à leurs yeux des monceaux de piastres. Des prestidigitateurs de Huamanga, pauvres diables déguenillés, jonglaient avec des poignards et des boules, éteignaient dans leur bouche des charbons allumés, ou se perçaient la langue avec des aiguilles ; les ânes, les mules, les chevaux, confondus avec le public, prenaient part à ce spectacle. Un nuage de fumée, envolé des fourneaux, des chicherias et des rôtisseries établis en plein air, planait au-