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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/273

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mini, se rétrécissait de plus en plus. Large de 69 mètres et profond de 4 à 7, à l’endroit où je l’avais pris, son lit, devant Yauri, avait à peine une largeur de 12 mètres. Depuis longtemps, ses ponts de granit à trois arches avaient disparu pour faire place à des ponts de bois remplacés eux-mêmes, quelques lieues plus haut, par ces escarpolettes primitives que les indigènes nomment tantôt crisnejas et tantôt maromas, selon leur mode de structure et leur balancement plus ou moins prononcé. Bref, je m’attendais d’heure en heure à voir le roi des fleuves, l’Apuyacuna[1], barré par un simple tronc d’arbre comme un ruisseau vulgaire.

Durant ce trajet, d’une vingtaine de lieues, fait du nord au sud et sous le 74e parallèle, j’avais traversé successivement, sans sortir de l’Entre-Sierra, toutes les zones de température et de végétation qui séparent les vallées de l’ouest des plateaux andéens. Ainsi dans la province de Paruro, les vals de Tocsihuaylla et de Huancachu m’avaient offert la chirimoya, l’orange, la canne à sucre, la grenade, la pastèque, la lucma, le pacay, la figue, et le raisin ; à Capacmarca, je n’avais plus trouvé que la pêche, la poire et la fraise d’Europe ; des pommiers, des

  1. Littéralement : « seigneur des eaux. » C’est le nom que donnent à l’Apurimac les habitants des vallées orientales de Huarancalqui, d’Ayacucho et de Huanta, ainsi que les Indiens Antis, Campas ou Mascas, dont la grande nation, divisée en une douzaine de tribus, habite la région inférieure du Pajonal.