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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/315

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dans les coins de la chambre ces provisions et ces objets qui en occupaient le centre, l’exiguïté du logis était telle, qu’il ne put empêcher que mon almofrez ne se trouvât placé sur une litière de pommes de terre, ma tête appuyée contre un sac de bosta et mes talons élevés à dix-huit pouces au-dessus du niveau de celle-ci. La position du colonel et de l’aide de camp n’était pas moins critique que la mienne. Resserrés entre des amphores et des pains de suif, et se touchant par les rotules, ils figuraient vaguement deux Z en regard. Avant de me coucher j’allai jeter un coup d’œil dans la chambre voisine. Nos dix-huit hommes en avaient déjà pris possession, et réunis, ou plutôt entassés l’un sur l’autre autour du foyer, riaient, chantonnaient, babillaient en grillant du maïs ou en rôtissant des viandes, et cela d’un air si profondément heureux, que je revins m’ensevelir sous mes couvertures, en bénissant Dieu qui m’avait donné l’idée de ce déplacement.

À part la visite de quelques rats domiciliés dans le chaume de la toiture, et le rude assaut que nous livrèrent des légions de puces, mais que nous repoussâmes par des soubresauts continus, la nuit n’offrit aucun incident remarquable. L’aurore nous trouva assis sur notre couche, les paupières gonflées et le visage quelque peu tatoué. Après une série de lamentations que j’eus à subir de la part du co-