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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/321

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git était un chapeton d’Espagne, âpre au gain comme ils le sont tous, — toi seul excepté, — me dit-il, — et à qui un pauvre llamero avait révélé l’existence de la mine de Quimsachata, ce serro jaspé de taches rousses, que l’on voit d’ici au pied des premiers versants de la Raya. Maintenant, si tu veux savoir quel service ton compatriote avait pu rendre à un conducteur de lamas, pour que celui-ci se fût résolu à l’enrichir au mépris de la foi jurée entre nous, je te dirai à ce sujet ce que m’a dit mon père, qui tenait la chose de son aïeul. Le llamero, appelé par la mita, devait faire partie d’un détachement de nos frères que le vice-roi envoyait travailler dans un socabon de Potosi nouvellement ouvert ; mais l’Indien aime mieux vivre en liberté sur ses hauteurs que d’aller se renfermer dans une mine, surtout quand cette mine est à trois cents lieues de son pays. Le llamero laissa donc la troupe partir sans lui, puis, comme il craignait que le corrégidor de la province ne le fît mourir sous le fouet, il alla trouver Vilafro, qui l’accueillit et le cacha dans sa maison. Par reconnaissance, l’Indien livra au chapeton le secret de la mine. Vilafro ne tarda pas à s’enrichir, car Quimsachata était comme une source vive d’où le métal coulait à flots. Dans la première semaine de son exploitation, elle produisit 95 000 piastres (275 000 fr.). Après cinq années de travail, l’Espagnol avait amassé tant d’argent, qu’il en ferrait ses chevaux et ses