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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/35

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José Gabriel Tupac-Amaru. Ses cheveux étaient en désordre et ses yeux lançaient des éclairs. Je priai mon compadre, un tio Juan Cancio qui se trouvait là, de m apprendre de quoi il s’agissait. « Compadre, me répondit-il, l’Espagnol Antonio Arriega, le corrégidor de la province, vient de frapper nos métairies d’un nouvel impôt, pour pouvoir rembourser au trésor royal les trente mille piastres qu’il a perdues au jeu la nuit dernière. — Et que dit le seigneur Tupac-Amaru ? demandai-je à mon compadre. — Il propose à nos amis de l’accompagner chez le corrégidor, à qui il veut dire son fait, mais ceux-ci refusent, craignant de s’exposer à la colère de l’Espagnol, qui est homme à les faire pendre. — À la maison du corrégidor ! » criai-je alors de toutes mes forces. La foule effrayée s’écarta pour me laisser passer. Tupac-Amaru vint à moi et me serra la main. « Tu es un brave, me dit-il, viens avec moi chez le corrégidor. » Les Indiens eurent honte de leur couardise et se précipitèrent à notre suite. Nous entrâmes dans la maison de l’Espagnol, et, malgré ses prières et ses larmes, car la peur le faisait pleurer comme un enfant, Tupac-Amaru le saisit au collet et le conduisit lui-même en prison. Le lendemain, nous le pendions, après lui avoir attaché sur la poitrine un écriteau qui portait ces mots, tracés de la propre main du cacique : « Mort aux Espagnols. »