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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/350

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tait simple et précis, comme l’Histoire de France de M. Le Ragois.

Parfaitement éclairé sur tous ces points, je ne pris que le temps d’allumer un cigare, puis je m’affermis dans les étriers, et, rendant la bride à mon cheval, un overo (pie) de quarante francs, dont l’ardeur était infatigable, je me lançai résolûment dans la carrière. Midi sonnait en ce moment à toutes les horloges de la ville. Pendant une heure tout alla pour le mieux ; j’avais gagné la pampa d’Anta, le nord était resté constamment à ma gauche, et comme ma bête trottait à merveille, je m’attendais de minute en minute à découvrir la grande route et les villages qu’on m’avait signalés. La plaine que je traversais, élevée de quatorze mille pieds au-dessus de la mer, et s’étendant sans bornes à l’horizon, avait la tristesse et la solennité d’un site de la Bible. Un gramen ras et dur en recouvrait le sol, formé de sable et d’humus ; des buissons d’évolvulus et de sauge pourpre, des énothères épineuses et quelques plantes acaules, émaillaient de leurs rares fleurs cette solitude, d’où la vie et le mouvement paraissaient bannis. Nul oiseau ne traversait l’air, nul insecte ne bruissait sous les herbes ; tout semblait mort ou endormi dans l’étrange paysage, au-dessus duquel le ciel arrondissait sa vaste coupole d’un bleu lumineux à fatiguer les yeux les plus infatigables.