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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/387

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Son parti fut bientôt pris ; il réalisa sa fortune, en laissa un tiers à sa femme, garda le reste et se disposa à passer en Europe, emmenant sa fille avec lui. Déjà nous faisions les préparatifs du voyage, lorsqu’un soir en sortant de table le colonel chancela tout à coup et perdit connaissance. Nous l’emportâmes dans sa chambre, où sa femme voulut être seule à le soigner. Pendant la nuit, on m’envoya au couvent de la Merced pour en ramener un confesseur. Le malade, sentant qu’il s’affaiblissait, demandait à recevoir les sacrements. Comme j’entrais avec le padre, la femme du colonel me remit une lettre pour un de ses parents qui habitait Lunahuana, en me recommandant de faire diligence. Malgré toute ma répugnance à quitter la maison en un pareil moment, il me fallut obéir. Je sellai le meilleur cheval du colonel et partis aussitôt à franc étrier. Le lendemain soir, j’étais de retour. J’avais fait près de quarante lieues de Cordillère. Le pauvre cheval mourut, il est vrai, des suites du voyage.

« Mon premier soin en arrivant avait été de demander des nouvelles du colonel ; on m’apprit qu’il était mort dans la matinée, et que la décomposition du corps avait été si rapide, qu’on s’était vu forcé de l’enterrer avant le temps prescrit. L’idée d’un empoisonnement me traversa l’esprit, mais une pareille accusation a besoin de preuves, et comme je n’en pouvais fournir aucune, je gardai mes soup-