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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/391

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a l’air de vous intéresser, que mes perroquets sont plus qu’un simple capital sur lequel j’aurais fondé mon commerce, c’est, pour ainsi dire, une mine que j’exploite et qui se renouvelle constamment. Aussi je ne leur épargne, comme vous voyez, ni la nourriture, ni l’éducation, ni les bons traitements, et si je les tiens enchaînés, c’est que j’ai cru remarquer chez eux des dispositions à l’ingratitude. Quant à l’absence de leurs plumes, qui paraît vous étonner, elle est due à une cause bien simple : deux fois par an j’ai soin d’en faire la récolte. Ces plumes, dont mes oiseaux ne sauraient que faire, puisqu’ils ne volent pas et que je pourvois à tous leurs besoins, me servent à fabriquer des coiffures, des bracelets, des écharpes, que je loue aux Indiens pour leurs processions costumées. Le Corpus[1] d’Urubamba, par exemple, m’a rapporté à lui seul, cette année, plus de cinquante réaux d’argent. Avec mes costumes de sauvages, j’ai encore des déguisements de chevreuils, qui me donnent quatre réaux par journée. Les réaux ajoutés aux réaux font des piastres, et chaque piastre grossit d’autant mon petit pécule. »

  1. Fête-Dieu. Toutes les processions, au Pérou, sont escortées d’Indiens, déguisés en femmes, en marquis, en sauvages, ou simplement affublés d’une peau de chevreuil : ils entourent les images saintes, les apostrophent en leur montrant le poing et se livrent devant elles à des évolutions grotesques et souvent obscènes. Il va sans dire que la plupart de ces acteurs sont toujours à peu près ivres.