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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/45

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pieds de ma tête et les steeple-chases que, pendant la nuit, les cochons d’Inde exécutèrent autour de moi.

À l’heure dite, l’arriero frappait à ma porte pour m’avertir qu’il était temps de me lever. En un clin d’œil, je fus prêt à le suivre. Nous nous rendîmes dans le champ de foire, où m’attendait une mule toute sellée ; j’enfourchai ma bête ; le muletier cria : « Vamos ! » et notre troupe, composée de trois mozos et de seize animaux chargés de colis, se mit en marche au carillon de la Madrina.

Je ne tardai pas à comprendre, au pas grave dont nous cheminions, qu’il nous faudrait bien quinze jours pour faire les vingt-cinq lieues qui nous séparaient de Cuzco. Mais cette lenteur de locomotion, qui eût allumé la bile d’un homme affairé et fait le désespoir d’un amoureux, me souriait assez pour le moment. J’avais encore sur le cœur mes marches forcées à travers les relais de la haute Cordillère : et l’obligation de gagner chaque nuit un gîte, sous peine de geler en chemin, m’ayant toujours paru aussi absurde que tyrannioue, je n’étais pas fâché de pouvoir m’y soustraire.

À partir de Tungasuca, les punas disparurent et furent remplacées par des montagnes à pente douce et à croupe arrondie, qui bordaient la route des deux côtés. Le rio Vilcabamba, sorti de la lagune de Langui, coulait à notre droite, au fond d’un ravin en-