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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/67

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d’or et d’incrustations de pierres précieuses. Que sont devenues ces merveilles, où sont aujourd’hui ceux qui les créèrent ?… Hélas ! comme dit votre compatriote Bossuet, que j’ai chez moi traduit en espagnol, « le temps à fait un pas, et la face de la terre a été renouvelée… »

Sahuaraura s’interrompit au cri que jeta le laquais en paraissant au fond du potager. L’homme faisait avec ses bras des signaux de télégraphe.

« Mon oncle, le dîner vous attend, dit la plus jeune des princesses, qui comprit sur-le-champ cette pantomime. »

Le chanoine nous conduisit au pas de charge vers le comedor, où le couvert était dressé. Après un court benedicite, nous attaquâmes les fruits, les gâteaux et les confitures qui couvraient la table, et, selon la coutume ando-péruvienne, le dessert précéda le dîner. Quand nous parûmes suffisamment gorgés de sucreries, on servit le potage, composé de chuño[1] de mouton sec et de fromage blanc, et relevé par un coulis de baume, de safran et de piments rouges. Au potage succédèrent deux entrées ; une tête de veau flanquée de fruits et de légumes et un sullu[2] de brebis aux raisins secs ; puis, vinrent

  1. Pommes de terre légèrement écrasées et exposées pendant quelques nuits à la gelée. On les fait bouillir avec du fromage. C’est le mets favori des habitants de la Sierra.
  2. Agneau mort-né. Le sullu le plus estimé des gens du pays