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Page:Marcoy - Scènes et paysages dans les Andes, 1.djvu/79

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Elles rougirent un peu du compliment, rirent beaucoup de la façon dont j’écorchais leur idiome, et sautèrent d’un bond sur le dos de leurs montures ; puis, quand le chanoine se fut installé sur la sienne, nous enfilâmes un zahuan obscur, qui servait d’écurie, et nous nous trouvâmes dans la rue. L’Indien, portant sur sa tête la manne aux provisions, nous suivit au pas gymnastique.

Parvenu à l’extrémité du faubourg de la Recoleta, et comme nous venions d’entrer en rase campagne, Sahuaraura me montra à quelque distance, sur le talus qui bordait le chemin, un arbre dont le tronc rugueux, le maigre feuillage et les racines déchaussées annonçaient l’extrême vieillesse.

« C’est le chachacumayoc[1], ou l’arbre de la séparation, me dit-il, planté, si l’on en croit la chronique, par Capar-Yupanqui[2], cinquième empereur de la dynastie du Soleil. Depuis cette époque, pas un voyageur n’a quitté Cuzco sans venir, en compagnie de ses parents et de ses amis, s’asseoir un moment sous cet arbre pour y recevoir leurs adieux et


    pieds de hauteur, donne une ombre épaisse, sous laquelle viennent se blottir, durant le jour, cinq ou six variétés de tourterelles, depuis le cuculi, qui est se la grosseur d’un pigeon ramier, jusqu’à l’urpilla, de la taille d’un moineau franc.

  1. Capparis ruidifolia, famille des capparidées. C’est le seul individu de ce genre que j’aie trouvé dans un périmètre de quatre-vingts lieues.
  2. Le règne de cet Inca remonte à la fin du treizième siècle.