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LE MARI PASSEPORT

Le roi du Nedj, Ibn Séoud, ayant reçu des renseignements inquiétants sur ma soi-disant activité d’espionne franco-anglaise, devait tout mettre en jeu pour m’arrêter dès mon débarquement à Djeddah. Or, légalement, j’étais parfaitement en règle, en tant que musulmane et Nedjienne, et, d’autre part, il craignait probablement, en me faisant disparaître dans le désert, de s’attirer des complications diplomatiques de la part des pays dont on me supposait l’agent. Il était beaucoup plus simple de supprimer Soleiman et de m’accuser de sa mort, à l’aide des faux témoignages de ceux qui soi-disant auraient assisté le moribond. On sait que, d’après la loi coranique, la parole du mourant fait foi et entraîne la condamnation sans jugement.

Je me dois d’ailleurs d’ajouter que le délégué français, M. Maigret, n’a jamais cru à cette version, quoique j’aie essayé de lui démontrer les coïncidences troublantes qu’il y avait entre cette hypothèse et les faits tels qu’ils se sont passés. À mon arrivée à Paris j’ai été également m’entretenir, à ce sujet, avec Si Kaddour ben Gabrit, ami personnel du roi Ibn Séoud, qui s’est refusé à admettre une telle machination de la part de Sa Majesté.

Ils ont leur opinion, j’ai la mienne.


Étant donné tous ces faits, il reste à expliquer l’attitude du Gouvernement français qui, quoique mon innocence totale ait été reconnue, puisque j’ai été acquittée faute d’une seule preuve et que la seule accusation retenue contre moi était fondée sur les paroles du mourant (ont-elles été prononcées ?), se refuse à me laisser revenir en Syrie et, après m’avoir forcée à rentrer en France, me condamne à vivre à Paris, alors que tous mes intérêts sont en Orient. Le Gouvernement me refuse ma