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Page:Marguerite de France - Memoires et Lettres.djvu/133

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DE MARGUERITE DE VALOIS.

qu’ayant faict la nuict suivante, le lendemain elle m’amene son mary, qui, me faisant un grand discours des justes occasions qu’il avoit de desirer de s’affranchir de la tyrannie de l’Espaignol (en quoy il ne pensoit point entreprendre contre son prince naturel, sçachant que la souveraineté de Flandre appartenoit au roy de France), me represente les moiens qu’il avoit d’establir mon frere en Flandre, ayant tout le Haynault à sa devotion, qui s’estendoit jusques bien pres de Bruxelles. Il n’estoit en peine que du Cambresis, qui estoit entre la Flandre et le Haynault, me disoit qu’il seroit bon de gaigner monsieur d’Inchy, qui estoit encore là avec moy. Je ne luy voulus descouvrir la parole que j’en avois ; mais luy dis que je le priois luy-mesme de s’y emploier, ce qu’il pourroit mieux faire que moy, estant son voisin et amy ; et lui ayant asseuré de l’estat qu’il pouvoit faire de l’amitié et bienvueillance de mon frere, à la fortune duquel il participeroit aultant de grandeur et d’auctorité, que meritoit un si grand et si signalé service reçeu de personne de sa qualité, nous resolusmes qu’à mon retour je m’arresterois chez moy, à La Fere, où mon frere viendroit, et que là monsieur de Montigny, frere du comte de Lalain, viendroit traicter avec mon frere de cette affaire.

Pendant que je fus là, je le confirmay et fortifiay tousjours en cette volonté, à quoy sa femme apportoit non moins d’affection que moy. Et le jour venu qu’il me falloit partir de cette belle compagnie de Mons, ce ne fust sans reciproque regret, et de toutes