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Page:Marguerite de France - Memoires et Lettres.djvu/222

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MÉMOIRE JUSTIFICATIF

il me dit qu’il en avoit eu beaucoup d’avis et d’appareils, et que monsieur de Guise faisoit assemblée à Joinville, pour faire l’execution de cette entreprise : et moy estant à la chasse, je trouvay dix ou douze chevaux avec armes, comme fit le guidon de monsieur le prince de Condé, qui en trouva quarante ou cinquante en ce mesme esquipage, qui estoit assez pour nous faire croire quelque chose. Toutesfois le roy de Pologne estant arrivé à Vitry, je ne faillis à luy dire tous les bruits qui couroient de luy ; lequel m’asseura qu’il n’en sçavoit rien , et que si j’estois en doute là de messieurs de Guise, que je ferois bien de demeurer auprez du Roy, et l’aller trouver à Nancy pour prendre congé de luy ; ce que la Royne me fist commander par le Roy.

Le Roy partit de Vitry pour aller à Chaalons, où j’allay avec luy ; où estant, luy demanday congé pour tenir la promesse, que j’avois faicte au roy de Pologne, d’aller prendre congé de luy à Nancy, ce qu’il me refusa, et me commanda me tenir prez de luy. Sept ou huit jours après avoir esté à Chaalons, je sceus le départ du roy de Pologne ; et me fust asseuré qu’à son dernier à Dieu, oubliant l’amitié et bonne chere qu’il m’avoit promis, il ne se souvint de vous supplier, madame, que vous m’eussiez en vostre protection ; mais au contraire il vous recommanda monsieur de Guise, afin que par vostre moyen il fust faict connestable, ce que je ne voulois nullement croyre ; mais estant vostre majesté de retour à Rheims, vous me fistes une si maigre mine, et commençastes là d’avoir