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IIJe JOURNÉE

faict tort, j’en ay ma pugnition, car je suis si blessé que je n’espère jamais en eschaper. »

Le [beau-frère du] Gentil homme essaya de le remonter à cheval le mieus qu’il put & le ramena en sa maison, où le lendemain il trespassa & dist & confessa devant tous les parens du dict Gentil homme que luy mesmes estoit cause de sa mort.

Mais icelluy Gentil homme, pour satisfaire à la Justice, fut conseillé d’aller demander sa grace au Roy Françoys, premier de ce nom, par quoy, après avoir faict enterrer honorablement mary, femme & enfant, s’en alla le sainct vendredy pourchasser sa rémission à la Court, & la rapporta Maistre François Olivier, lequel l’obtint pour le pauvre beau-frère, estant iceluy Olivier Chancelier d’Alençon, & depuis par ses vertuz esleu du Roy pour Chancellier de France.


« Mes Dames, je crois que, après avoir entendu ceste histoire très véritable, il n’y a aucunes de vous qui ne pense deux fois à loger tels pellerins en sa maison, & sçaurez qu’il n’y a plus dangereux venin que celluy qui est dissimulé.

— Pensez, » dist Hircan, « que ce mary estoit ung bon sot d’amener ung tel galland soupper auprès d’une si belle & honneste femme.

— J’ay veu le temps, » dist Geburon, « que en nostre pays il n’y avoit maison où il n’y eust chambre