Page:Marguerite de Navarre - Les Marguerites de la Marguerite des Princesses, t. 1, éd. Frank, 1873.djvu/36

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nir une cause de brouille complète, par suite des scènes pénibles qu’il amena. Henri II avait bien voulu continuer à sa tante la pension qu’elle tenait de François Ier ; le connétable de Montmorency, rentré en faveur depuis la mort de François Ier, avait reçu de Marguerite une lettre belle et touchante, où, laissant de côté de trop justes griefs, elle lui remémorait avec une dignité sereine l’amitié qu’elle lui avait montrée : « Vous avez eu beaucoup d’amys, lui disait-elle, mais soubvenez-vous que vous n’avez eu qu’une mère.[1]  » Il s’abstint de lui nuire en cette circonstance, et Marguerite, ou plutôt le peuple d’obligés qui vivait d’elle, obtint satisfaction. Mais, au lieu de se faire le bâton de vieillesse de sa bienfaitrice, le connétable, gorgé d’emplois, comblé d’honneurs, accepta, pour complaire au nouveau roi, le rôle infâme d’espion ; il reconnut le pardon et la confiance de Marguerite par une persécution ténébreuse qui devait avoir pour résultat de lui arracher le consentement qu’elle refusait aux projets du roi. Elle pleura, mais il fallut se soumettre. La célébration du mariage de Jeanne d’Albret eut lieu le 20 octobre 1548. Henri II parle fort dédaigneusement, dans une lettre au connétable, de l’attitude du roi de Navarre et des chagrins de « la bonne dame». Les fêtes magnifiques qui avaient signalé auparavant le passage de la cour par Lyon n’avaient pas eu le pouvoir de distraire Marguerite : il n’existait plus de fêtes pour elle. Lyon la ramenait en arrière, vers des jours plus heureux, suivis

    reçu d’accomplissement ; et après la défection du duc de Clèves, en 1543, le pape ayant cassé les liens religieux, le mariage fut solennellement rompu.

  1. Lettres de la Reine de Navarre, t. I (année 1547).