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Page:Marguerite de Navarre - Les Marguerites de la Marguerite des Princesses, t. 1, éd. Frank, 1873.djvu/37

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de tristes lendemains. Là, nul de ceux qu’elle avait connus ne vint la saluer au passage. Désormais le refrain qu’elle adoptera est Douleur :


Douleur n’y a qu’au temps de la misere
Se recorder de l’heureux et prospere,
Comme autrefoy en Dante j’ay trouvé,
Mais le sçay mieulx pour avoir esprouvé
Félicité et infortune austère.[1]

De retour en Béarn, la reine de Navarre mit ordre à ses affaires. Au commencement de l’année 1549 elle était au château de Pau et jouissait de la réception enthousiaste faite à Jeanne d’Albret par les gens du pays. Sa santé s’affaiblissant de plus en plus, elle abandonna l’administration de ses biens au roi de Navarre et ne s’occupa plus que de la mort, non pour la craindre, quoi qu’en ait dit Brantôme, mais pour l’invoquer. Elle ne demandait plus que du repos. « Seigneur »,s’écrie- t-elle


Essuyez des tristes yeux
Le long gémir,
Et me donnez pour le mieux
Un doux dormir.[2]


Ce doux dormir, elle l’avait bien gagné, « celle qui, entourée de toutes les grandeurs, a dit d’elle-même qu’elle avait porté plus que son faix de l’ennui commun à toute créature bien née ; expression généreuse et mélan-

  1. Bibl. de l’Arsenal, Vers inédits de François Ier et de Marguerite, passage reproduit par La Ferrière-Percy. ( Ouvr. cité. )
  2. Les Marguerites de la Marguerite (Chansons spirituelles).