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Page:Marguerite de Navarre - Les Marguerites de la Marguerite des Princesses, t. 1, éd. Frank, 1873.djvu/48

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moire de la reine de Navarre ». Ces écrivains graves, qui sont-ils? Bayle, de Thou, Sainte-Marthe, le cardinal du Bellay ; ajoutez aux précédents Érasme qui, louant dans une lettre la force d’âme, la philosophie, les vertus diverses de Marguerite, n’oublie pas la chasteté. Pourquoi donc certains critiques, tout en refusant de voir en elle « une femme adultère » et « une veuve débauchée », lui donnent-ils, sous prétexte « d’imagination libertine », le nom de « coquette aux lèvres faciles[1] » ? Elle était femme, elle inspirait de vives passions et s’interdisait d’y répondre : de là ces plaintes de poètes sur les faveurs, incomplètes à leur gré, qu’ils nomment des faveurs aigre-douces. Mais ils ne s’expriment pas toujours avec cet accent dépité, et Jacques Peletier peint dignement ces divines amitiés conçues par les poètes pour leur protectrice :

Leur désir vers toi les envoie,
Ta douceur leur ouvre la voie.
Ta majesté leur fait sentir
Un feu vif dedans leur poitrine.

Cette douceur et cette majesté, objet respecté de si divines amitiés, comment ne voit-on pas qu’il est puéril de les transformer en moyens de coquette ? On ne reconnaît pas Célimène dans ce « regard chaste où n’habite nul vice », dans ce « rond parler, sans fard, sans artifice, si beau, si bon[2] ... » que célèbre encore Marot

  1. V. C.d’Héricault (Notice sur Marguerite d’Angoulême). — Collection des Poètes français publ. par Crépet.
  2. V. Epistre (inédite) de Marot (en tête du ier" vol. des Lettres publ. par Génin.