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CROQUIS LAURENTIENS

de Plaisance. C’est le naufrage du Cameo en 1861, celui de la barque norvégienne de Lorentsen, et d’autres, et d’autres encore !…

Ici ou là, vous rencontrez des rescapés, recueillis par les Madelinots et établis au milieu d’eux. Deux cas entre beaucoup d’autres. Par une froide et obscure nuit de décembre, il y a déjà longtemps, un voilier portant du bois à Bristol fut jeté sur la Dune-du-Nord. Seul de tout l’équipage, un jeune homme nommé Le Bourdais, originaire de l’Islet, échappa à la mort, se traînant glacé au travers d’une neige aveuglante, cherchant un improbable abri. Il n’y a plus affreux désert que la dune, l’hiver ! Pas un arbre, pas un buisson, pas de ciel, pas d’horizon ! Péniblement, le marin réussit à atteindre une cabane de pêche abandonnée, vide, et ouverte à tous les vents. Quelles heures d’horribles angoisses morales ! Va-t-il mourir ici ? Non ! Il se décide à sortir et à lutter encore. Dans la grande nuit noire il marche, il marche, ne sentant déjà plus ses pieds, entendant le rugissement de la mer à droite, à gauche ! Des minutes qui sont des heures ! Le froid le terrasse, enfin !… Il est maintenant sur ses mains, usant ses dernières forces à ramper… Une autre cabane !… Hélas, vide aussi !… Il a les deux pieds gelés. Il sent la mort monter doucement dans ses jambes. Il ne souffre plus. Il s’endort, inconscient, du sommeil dont on ne se