Page:Marie Louise Gagneur Les Forcats du mariage 1869.djvu/278

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
272
les forçats du mariage

» Robert, ne me trahis pas, je t’en supplie. Je pourrais tout supporter, l’abandon de mon mari, le mépris du monde, tout, excepté la douleur de perdre ton amour.

» Je veux te voir demain, je le veux. Il m’a rendu sa confiance. Qu’il est bon, même au milieu de ses colères 1 Je suis une indigne créature de le tromper ainsi ! Mon grand amour pour toi est ma seule excuse, un amour insensé, aveugle. Mon Robert, mon soleil, mon seul Dieu ; car, pour toi, j’ai renié ma religion, j’ai damné mon âme. Il n’y aura ni verrous, ni grilles, ni océan qui pourront jamais nous séparer.

» Ah ! qui m’eût dit hier au soir que cette nuit si pure et si calme cachât pour nous tant d’orages ; que cette heure d’ivresse, pleine de parfums et d’harmonie, était la dernière peut-être ! Mais non, ce ne sera pas la dernière ; demain, de trois à cinq heures, je t’attendrai. Je t’en conjure, n’y manque pas. J’ai le cœur oppressé, inquiet, malade à en mourir. Toi seul peux le rassurer, le guérir.

» À toi toujours.

» Un baiser infini. »

Ayant terminé cette lettre, Juliette s’habilla assez élégamment, mit une robe claire, un chapeau provocant.

Elle sortit.