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les forçats du mariage

Dès qu’elle fui seule, Marcelle se jeta à genoux, et laissa éclater les sanglots qui la suffoquaient.

— Mon Dieu, mon Dieu ! Comme je l’aime ! s’écria-t-elle en joignant les mains avec désespoir ; donnez-moi la force de lui résister. Lui résister ! Pauvre cœur, si bon, si dévoué ! Lui qui a déjà tant souffert, le faire souffrir encore, c’est horrible.

Elle marchait maintenant à travers la chambre, indécise, troublée. Elle se rappelait la résignation douloureuse, le désespoir contenu qu’exprimait tout à l’heure le visage d’Étienne.

— S’il allait partir !… Ne plus le voir !

À cette pensée, elle était saisie d’une sorte d’égarement, l’air manquait à sa poitrine, et son cœur s’arrêtait de battre. Elle songeait à courir chez lui, à se jeter à ses pieds.

Elle alla jusqu’à la porte, l’ouvrit ; mais la tempête, qui redoublait en cet instant, la repoussa violemment.

Elle rentra.

— Je suis folle, se dit-elle. Me quitter, le pourrait-il ? Nos cœurs ne sont-ils pas si étroitement liés qu’ils sont comme rivés l’un à l’autre ?… Et cependant, pour résister à cet amour, il faudrait fuir, je le sens bien. Pardonnez-moi, mon Dieu ! je ne le pourrai pas. Mais Étienne a raison : Vous êtes bon, et vous n’ordonnez pas un pareil sacrifice, un sacrifice inutile, dont personne ne profiterait… D’ailleurs est-il bien sûr que ce soit un crime ? Me donner