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les forçats du mariage

à un homme qui m’aime autant, que j’aime, moi, de toute mon âme, y a-t-il rien là qui puisse blesser ma dignité ?

Elle s’arrêta, voila son visage de ses mains.

— Est-ce bien moi qui raisonne ainsi ?

Pendant quelques instants, elle resta accablée, la rougeur au front.

Puis, soudain se redressant avec exaltation :

— Après tout, si c’est un crime, eh bien ! je le commettrai pour lui. Oui, mon cœur, ma conscience, ma dignité même m’y poussent. Ce qui est honteux, c’est de faire souffrir ceux qui nous aiment. Ah ! qu’il me tarde de le revoir et de lui confier pour toujours ma vie, mon bonheur et mon honneur aussi, qu’il saura mieux sauvegarder que moi-même !

Plus calme maintenant, elle alla se coucher à côté des enfants.


XLIII


Étienne, au lieu de rentrer chez lui, resta dehors sur la grève. Mais ce n’était point pour observer les horreurs grandioses de cette nuit d’orage, les incendies du ciel et la tourmente des flots.

Il marchait lentement, la tête penchée en avant. Il ne sentait ni la pluie qui mouillait son visage, ni la rafale, qui par instant s’opposait à sa marche.