Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/113

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Ce qui donna occasion à l’abbé Joseph de les entretenir sur l’amitié, fut que, leur ayant demandé s’ils étaient frères, ils lui répondirent qu’ils ne l’étaient que par l’esprit, et que depuis leur conversion ils avaient toujours été inséparablement unis, soit dans le monastère, soit dans le pèlerinage qu’ils avaient entrepris dans le dessein de s’avancer dans la vie intérieure et spirituelle. Ce fut donc à ce sujet qu’il leur donna les règles saintes de charité qu’on doit garder pour rendre les amitiés véritablement chrétiennes et religieuses.

La conférence dura jusqu’au soir, et, le silence de la nuit les empêchant de s’entretenir plus longtemps, ce vénérable vieillard les mena dans une cellule séparée pour y prendre un peu de repos. « Mais, dit Cassien, le feu que ses saints discours avaient allumé dans nos cœurs nous ayant fait passer la nuit sans dormir, nous en sortîmes de grand matin, et nous en étant éloignés d’environ cent pas, nous nous assîmes dans un lieu fort retiré. »

À peine furent-ils assis que l’abbé Germain, poussant un profond soupir, prit la parole et exprima à Cassien le regret de ne pouvoir, en raison de leur promesse, suivre les exemples de perfection qu’ils trouvaient dans ce désert.

Ces réflexions les mirent dans une grande inquiétude. D’une part ils eussent voulu demeurer parmi ces saints solitaires, dont les exemples et les discours les animaient puissamment ; mais, d’un autre côté, ils se trouvaient liés par la promesse qu’ils avaient faite à leur supérieur et aux religieux de leur monastère d’y retourner dans peu de temps.

Dans ces perplexités, Cassien dit à Germain qu’ils n’avaient point de moyen plus court pour se soulager de leur peine, que de demander conseil à ce saint vieillard et de lui déclarer leurs pensées.