Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/115

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parla du but d’un cénobite et d’un solitaire ; Pinufe, de la pénitence ; enfin, l’abbé Abraham, de la mortification.

La conférence de l’abbé Piammon leur avait inspiré un si grand amour pour la vie des anachorètes, qu’ils résolurent de s’y exercer ; et, quoique le vénérable Jean, qu’ils virent ensuite au monastère de l’abbé Paul, eût donné, dans l’entretien qu’il eut avec eux, la préférence à la vie cénobitique, ni son exemple ni son exhortation ne purent effacer l’impression que les paroles de l’abbé Piammon avaient faite sur leur cœur. Ainsi ils commencèrent tout de bon à apprendre les règles de la vie érémitique sous sa conduite : et un des plus parfaits solitaires de ce lieu, nommé Arquèbe, différent de l’évêque dont nous avons parlé, leur céda sa cellule avec tous les petits meubles qu’elle contenait, et s’en bâtit une ailleurs.

Le désert de Dioque était un séjour très-pénible à la nature ; il fallait un grand courage pour en soutenir les incommodités ; et Cassien et Germain n’y furent pas sans souffrir de grandes tentations. Une des plus fâcheuses et des plus délicates qu’ils eussent à combattre, fut le désir de retourner à leur pays chez leurs parents.

Agités donc par des pensées importunes, ils allèrent découvrir leur tentation à l’abbé Abraham, qui leur en fit connaître toute l’illusion dans l’entretien qu’il eut avec eux sur la mortification, dont Cassien a fait sa dernière conférence. « Il nous fit voir clairement, dit-il, que ces pensées, que le diable avait inspirées dans notre cœur, étaient des piéges où il nous voulait faire tomber ; et il nous enflamma du désir d’une véritable mortification. »

Ce désir n’était pas stérile en eux : ils menaient véritablement une vie très-rude ; car, outre qu’ils gagnaient leur vie par le travail de leurs mains, ils