Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/178

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autrement que lui. À Rome, il était trop connu ; il entreprit donc le voyage d’Orient, résolu de s’y établir. Évagre, Innocent et Héliodore le suivirent, et il ne porta avec lui que les livres dont il avait déjà fait un amas choisi. Après avoir parcouru la Thrace, le Pont, la Bithynie, la Galatie, la Cappadoce, la Cilicie, et être resté quelque temps à Tarse, lieu de la naissance de saint Paul, il vint à Antioche, et se retira dans le désert de Chalcis, sur les confins de la Syrie et de l’Arabie, où il embrassa la profession monastique.

Il y eut pour compagnons Innocent, Héliodore et Hylas. Le prêtre Évagre était resté à Antioche, d’où il lui faisait tenir les lettres qui lui étaient adressées de divers endroits. Pour réussir dans ce nouveau genre de vie, il se recommanda aux prières de saint Théodose et de quelques autres saints solitaires de Syrie, qu’il avait vus en passant lorsqu’il méditait sa retraite. « Je voudrais bien, leur dit-il, être maintenant avec vous ; et, quelque indigne que je sois de vous voir, j’aurais bien de la joie d’embrasser toute votre sainte communauté. Je verrais une solitude plus agréable que toutes les villes du monde, des déserts habités comme le paradis terrestre par une multitude de saints. Mais puisqu’un aussi grand pécheur que moi ne mérite pas de vivre en votre compagnie, je vous conjure du moins, et je suis sûr que vous pouvez obtenir cette grâce pour moi, de prier Dieu qu’il me délivre des ténèbres de ce monde. Je vous l’ai déjà dit de bouche, et je vous le répète encore aujourd’hui, il n’y a rien que je souhaite avec tant de passion que de me voir affranchi de la servitude du siècle… Il me semble qu’une vaste mer m’environne de tous côtés, et, dans la situation où je me trouve, je ne saurais, ni avancer ni reculer. C’est donc de vos prières que j’attends le vent favorable du Saint-Esprit