Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/192

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seulement les apparences, vous devez vous occuper uniquement de l’affaire de votre salut et ne vous plus embarrasser des intérêts de votre famille, puisque c’est en y renonçant que vous avez commencé d’être ce que vous êtes aujourd’hui. Faites paraître dans un extérieur négligé la beauté d’un cœur pur et innocent, et donnez à connaître par la pauvreté de vos vêtements combien vous méprisez tout ce que le monde estime, pourvu néanmoins que la vanité n’y ait point de part, et que vos paroles s’accordent toujours avec votre habit.

« Observez le jeûne, et ne cherchez point à flatter le corps par l’usage des bains. Modérez-vous pourtant dans vos jeûnes et usez-en avec discrétion, de peur qu’une trop grande abstinence ne vous affaiblisse trop l’estomac et ne vous oblige ensuite à manger plus qu’à l’ordinaire. Un peu de nourriture pris avec modération est profitable à l’âme et au corps… Tandis que vous demeurerez dans votre pays, regardez votre cellule comme un paradis terrestre. Allez cueillir dans l’Écriture sainte les différents fruits qu’elle produit ; faites-en vos délices et soyez toujours attaché à la lecture de ces livres divins. Occupez-vous uniquement du soin de votre âme, et sacrifiez-lui tout le reste.

« Comme il s’agit de former et d’instruire en vous un jeune solitaire qui, après avoir été élevé dès sa jeunesse dans l’étude des belles-lettres, s’est chargé du joug de Jésus-Christ, il faut examiner s’il vous est plus avantageux de vivre en particulier dans la solitude qu’en commun dans un monastère. Pour moi, je vous conseille de vous mettre en la compagnie des saints, de ne point vous conduire par vos lumières et de ne point vous engager sans guide dans des routes qui vous sont inconnues… Je ne prétends point condamner la vie solitaire, moi qui l’ai si souvent louée ;