Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/20

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C’est ce moment que nous pouvons appeler l’époque de la mission de saint Antoine, qui dépeupla les villes de ses habitants, et peupla les déserts de colonies de saints. Ils se multiplièrent sans nombre sous sa conduite. Ses miracles, les vertus dont il donnait des exemples héroïques, ses exhortations vives et puissantes firent de si fortes impressions sur les cœurs, que, comme dit saint Jean Chrysostome, les déserts de l’Égypte commencèrent alors à recevoir l’effet de la bénédiction que Jésus-Christ avait répandue sur ce pays lorsqu’il y était venu dans son enfance, et à devenir un paradis peuplé d’une infinité d’anges, car on pouvait bien appeler ainsi les solitaires qui l’habitaient.

Le saint n’oubliait rien, de son côté, pour procurer leur avancement dans la perfection. Il les encourageait par ses instructions, veillait sur eux avec une application continuelle, et les visitait en particulier, ceux mêmes qui étaient les plus éloignés, sans que son zèle se ralentit ou par la longueur ou par les dangers des chemins. Il se conduisait envers tous comme leur père, et soutenait ce titre par toute la tendresse de sa charité.

Mais, tandis qu’il les encourageait à s’avancer, sa prudence, égale à son zèle, le portait aussi à ne point se perdre lui-même de vue. Il se retirait souvent du milieu d’eux pour vaquer seul au salut de son âme ; et, passant alternativement de la retraite aux exercices de la charité, il se remplissait dans l’oraison pour ne donner que de son abondance.

Il apprit, par l’apparition d’un esprit céleste, qu’elle vie il devait mener en son particulier. Se trouvant un jour tenté d’ennui et agité de diverses pensées, il se plaignit à Dieu de ce que ce trouble l’empêchait d’opérer son salut, et le pria de lui inspirer ce qu’il devait faire. Après cette prière il sortit de sa cellule, et vit quelqu’un qui lui ressemblait parfaitement, comme si c’eût été un autre lui-même, qui était assis et appliqué