Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/21

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à faire des nattes avec des feuilles de palmier, et puis quittait le travail pour faire oraison, après laquelle il reprenait le travail, qu’il quittait ensuite pour recommencer la prière. C’était un ange qui lui apparaissait sous cette forme, et qui lui dit qu’il fit ainsi et qu’il serait sauvé. Cette représentation lui servit de règle de conduite ; il s’y conforma en passant successivement de la prière au travail des mains, et du travail à la prière, si pourtant on peut dire qu’il interrompit jamais son oraison, puisqu’en travaillant il avait habituellement son esprit élevé à Dieu.

Son travail ordinaire, conformément à cette apparition de l’ange, était de faire des nattes, et les solitaires s’y exerçaient communément, parce que les faisant assis, cette situation leur était plus commode pour se conserver dans le recueillement. Ils ne laissaient pourtant pas de labourer quelquefois la terre et de cultiver les jardins.

Nous avons vu qu’il ne mangeait qu’après le soleil couché. Il passait aussi cinq jours en certain temps sans rien prendre, et après un si long jeûne il se contentait d’un pain de six onces, qu’il faisait tremper dans l’eau avec du sel. Il y ajoutait d’autres fois quelques dattes ; et lorsqu’il fut vieux, ses disciples obtinrent qu’il leur permît de lui apporter tous les mois des olives, des légumes et de l’huile.

Il lui arrivait souvent de passer des nuits entières en oraison ; ou bien, après avoir reposé jusqu’à minuit, il se levait et priait les bras étendus jusqu’au lever du soleil, ou même jusqu’à trois heures du soir. Il trouvait tant de goût dans ce saint exercice, que lorsqu’il voyait venir le jour il s’écriait : « Ô soleil, pourquoi viens-tu me distraire par tes rayons, comme si tu ne te levais que pour me dérober la clarté de la véritable lumière ? » Cassien, qui rapporte ce trait du saint, ajoute que, parlant de l’oraison, il disait que celle d’un religieux