Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/36

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Ses disciples, fidèles exécuteurs de ses dernières volontés, enlevèrent son corps secrètement et cachèrent soigneusement le lieu de sa sépulture. Les saints prélats qui héritèrent de ses tuniques et de son manteau les conservèrent comme des trésors précieux. Il leur semblait, en considérant ces dépouilles du grand Antoine, qu’ils le voyaient lui-même ; et en les portant ils sentaient une joie intérieure, comme s’ils avaient été revêtus de son esprit.

On a remarqué que, quand il mourut, on chassait en même temps d’Alexandrie saint Athanase pour y introduire par le fer et le feu le malheureux Georges de Cappadoce. Ce fut peut-être pour cette raison que saint Antoine, voulant montrer qu’il mourait dans la communion de saint Athanase, ordonna qu’on lui portât sa tunique et son manteau.

Cet illustre prélat fait observer que le saint s’était soutenu avec une égale ferveur dans la pénitence et l’amour de la retraite depuis sa jeunesse jusqu’à sa mort ; que l’affaiblissement de ses forces dans sa vieillesse ne le porta jamais à désirer une nourriture délicate, ni à changer d’habits, ni à laver ses pieds, et que cependant il jouit d’une très-bonne santé jusqu’à sa dernière maladie ; que sa vue fut toujours bonne, qu’il n’avait pas perdu une seule dent, et qu’il était plus vigoureux et plus propre que ceux qui font bonne chère, qui usent des bains et qui changent souvent d’habits.

Mais ce qui prouve encore mieux sa vertu, ajoute le même saint docteur, c’est que, ne s’étant point rendu recommandable par les sciences ni par ses écrits, ni pour avoir excellé en aucun art, sa réputation s’était répandue si loin, et il était si universellement respecté et chéri, qu’il ne fut personne qui ne regrettât sa perte. Ainsi, on avait vu un homme simple qui s’était étudié toute sa vie à se cacher, qui vivait retiré dans une mon-