Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/43

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malades, qu’à la vertu de la bénédiction. C’est ainsi qu’il cachait par humilité la grâce qu’il avait reçue. Il en attribuait aussi les effets à la foi de ceux qui s’adressaient à lui, assurant qu’il n’était pas exaucé pour quelque mérite qu’il y eût en lui, mais seulement parce que Dieu voulait accorder ses faveurs à ces personnes.

Il faut parler à présent de la visite que lui firent Pallade et d’autres solitaires, et des admirables instructions qu’ils en reçurent. Pallade était dans le désert de Nitrie avec Évagre son maître, Albin, Ammon et trois autres. Comme ils s’entretenaient un jour du bruit que faisait la réputation de saint Jean, Évagre dit qu’il aurait une grande joie de savoir au vrai quelle était l’éminence de sa vertu, par quelqu’un qui fût capable de discerner son esprit et sa manière d’oraison.

Pallade, se sentant assez de forces pour faire le voyage et aller s’en assurer par lui-même, car il n’avait que vingt-six ans, partit sans rien dire à personne, et arriva enfin avec beaucoup de peine à la montagne du saint ; car outre qu’il y avait dix-huit journées de chemin, qu’il fit partie à pied et partie par eau, comme c’était le temps de l’accroissement du Nil, durant lequel les maladies étaient fréquentes, il tomba malade comme bien d’autres.

Il trouva en arrivant que le vestibule de la cellule du saint était fermé, et apprit qu’on ne l’ouvrait que le samedi et le dimanche. Il attendit jusqu’à ce temps-là qu’il lui fût permis d’entrer, et vit le saint assis à sa fenêtre, au travers de laquelle il parlait à ceux qui s’approchaient. Dès que le saint le vit, il le salua, et lui demanda, par un interprète, de quel pays il était, quel sujet l’amenait, ajoutant qu’il paraissait de la compagnie d’Évagre.

Pallade satisfit à toutes ces demandes ; mais, tandis qu’ils s’entretenaient ainsi, le gouverneur de la pro-