Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/44

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vince, nommé Alype, entra, et s’approcha de saint Jean en grande hâte. Le saint quitta alors Pallade, qui se retira à l’écart pour les laisser parler en liberté. Comme leur conversation était longue, Pallade commença à s’ennuyer d’attendre, et il s’éleva dans son cœur des sentiments de murmure, comme si le saint eût fait trop peu de cas de lui, et qu’il y eût dans son procédé acception de personnes ; de sorte qu’il songeait à se retirer tout à fait.

Le saint connut à ce moment ce qui se passait dans son âme, et lui envoya son interprète, appelé Théodore, pour lui dire de ne point entrer en impatience, qu’il allait bientôt renvoyer le gouverneur. Cette parole fit rentrer Pallade en lui-même. Il reconnut combien le saint était éclairé du Ciel, puisqu’il avait pénétré dans ses pensées, et attendit sans peine que le gouverneur fût retiré.

Alors saint Jean l’appela, et lui fit une douce correction sur le jugement qu’il avait porté, et le murmure intérieur auquel il s’était laissé aller ; après quoi, pour le consoler, il lui dit : « Ne savez-vous pas qu’il est écrit que ce ne sont pas les sains, mais les malades qui ont besoin de médecins ? (Matth., ix.) Je puis parler à vous quand je veux, et vous à moi ; et, quand je ne pourrais pas vous consoler, il y a d’autres pères et d’autres frères qui le peuvent faire. Mais ce gouverneur étant engagé sous la puissance du démon, dans les affaires temporelles dont il s’occupe, et étant venu à moi pour recevoir quelques avis salutaires, dans ce peu de temps qu’il a eu pour respirer, ainsi qu’un esclave qui fuit la domination d’un maître fâcheux et insupportable, quelle apparence y avait-il que je le quittasse pour parler à vous, qui vous occupez continuellement de ce qui regarde votre salut ? »

Pallade, ensuite de ceci, le supplia de prier pour