Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/91

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hommes, garde le silence et demeure dans le repos : ce sont là les premiers fondements que tu doives jeter pour élever l’édifice de ton salut. Saint Théodore dit qu’ayant reçu cette divine leçon, il commença dès lors plus que jamais à porter toutes ses affections vers le ciel. Son corps était à la vérité sur la terre ; mais la conversation familière de son cœur n’était plus qu’avec les esprits bienheureux. Elle lui servit, cette leçon si excellente, de règle de conduite pour toute la vie. Il ne cessa jamais de s’en faire l’application ; et rien ne paraît plus merveilleux en lui que le soin qu’il prit de la mettre en pratique ; ce qui l’a rendu un objet d’admiration à toute l’antiquité.

Il s’avança dans le désert à treize lieues loin de l’église de Scété, pour mieux s’éloigner du commerce des hommes. Il se renferma si rigoureusement dans sa cellule, qu’il aimait mieux, lorsqu’il avait besoin de quelque chose, se servir du ministère de ses disciples que de sortir pour l’aller chercher lui-même.

Il ne recevait qu’à regret ceux qui venaient le visiter, et tâchait, tant qu’il le pouvait raisonnablement, de se dispenser de les recevoir. Théophile, patriarche d’Alexandrie, alla le voir avec un officier et quelques autres personnages, et le pria de dire un mot d’édification. Il fut quelque temps sans répondre, et, prenant ensuite la parole, il leur parla ainsi : « Si je vous dis quelque chose, l’observerez-vous ? » Ils répondirent tous qu’ils y étaient disposés ; et il ajouta : « Eh bien donc, en quelque endroit que vous appreniez que soit Arsène, ne l’y venez plus chercher. »

Ce patriarche n’osait depuis interrompre sa retraite ; mais, comme il y avait trop à profiter seulement en le voyant, il ne put se déterminer tout à fait à n’y plus aller. Voulant donc le visiter une autrefois, il envoya