Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/96

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

thyme et saint Bernard se sont rendues depuis si familières à son exemple : Arsène, pourquoi as-tu quitté le monde ?

L’abbé Daniel, qui pouvait parler de lui en témoin oculaire, ayant eu le bonheur d’être son disciple, dit que, lorsqu’il était dans l’église, il se tenait derrière un pilier, soit pour n’être pas distrait par les objets extérieurs, soit afin que personne ne vît son visage, qui, en effet, paraissait comme celui d’un ange.

Autant ce grand saint était fidèle à garder le silence et la retraite, autant goûtait-il la douceur de la vie recueillie, et avait-il d’attrait pour la prière et pour l’oraison. On peut dire qu’il en faisait ses délices ; et là son cœur, dégagé de toutes les choses sensibles, s’élevait vers Dieu avec une ardeur admirable, pour se perdre, en quelque façon, dans son sein par la sublimité de sa contemplation. Un frère à qui Dieu faisait connaître quelquefois les merveilles de sa miséricorde dans ceux qu’il favorisait plus particulièrement de ces précieux dons, vint à sa cellule, et, regardant par la fenêtre, il vit le saint comme s’il eût été tout en feu. C’était l’ardeur dont son âme était saintement embrasée dans l’oraison que Dieu voulait manifester par ce prodige. Il frappa ensuite à la porte, et le saint, ayant ouvert et le voyant tout étonné, lui demanda s’il y avait longtemps qu’il frappait, et s’il avait vu quelque chose ; après quoi il l’entretint quelques moments, et le renvoya.

Il passait les nuits entières dans l’exercice de l’oraison ; et les samedis, le soleil se couchant derrière lui, lorsqu’il priait la face tournée à l’orient et les mains étendues vers le ciel, il continuait à prier dans cette situation jusqu’à ce que cet astre, se levant le lendemain, lui frappât les yeux de ses rayons ; et alors il s’asseyait pour prendre un peu de repos. Ceci fait voir