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Page:Marin - Vies choisies des Pères des déserts d'Orient, 1861.djvu/97

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qu’il était alors élevé au-dessus des sens et entièrement absorbé en Dieu, puisqu’il eût été impossible naturellement qu’il pût se soutenir sans cela une nuit entière les bras élevés vers le ciel.

Mais ce n’était pas seulement le samedi qu’il passait toute la nuit dans les veilles, il le faisait ordinairement, tant pour donner plus de temps à son attrait pour l’oraison, que par son esprit de mortification ; après avoir veillé la nuit, selon sa coutume, quand l’aurore venait à poindre, il appelait le sommeil, en disant : « Viens maintenant, méchant serviteur ; » puis, fermant les yeux, il dormait quelque peu de temps assis, et se levait presque aussitôt.

Il disait qu’un religieux qui voulait tout de bon combattre ses passions, et y réussir efficacement, devait se contenter de dormir une heure par jour. Le démon ne laissait pourtant pas de le tenter là-dessus comme sur d’autres sujets. Il s’en plaignit même une fois à ses disciples Alexandre et Zoïle, et les pria de passer la nuit avec lui pour observer s’il ne se laisserait pas vaincre au sommeil. Ils le firent, et aperçurent seulement que le matin au point du jour il avait fermé les yeux et respiré trois ou quatre fois, en sorte qu’ils ne purent pas comprendre s’il avait véritablement sommeillé.

Comme il ne souffrait rien dans son intérieur qui le détournât de l’esprit de prière et empêchât son cœur de s’élever à Dieu avec liberté, aussi craignait-il d’être détourné au dehors, par le moindre bruit, de l’attention à la présence de Dieu, surtout au temps de l’oraison. S’étant trouvé avec d’autres solitaires dans un endroit auprès duquel il y avait quantité de roseaux, il entendit du bruit et demanda aux autres ce que c’était. Ils lui dirent que c’était le vent qui soufflait dans des roseaux. « Je m’étonne, leur répondit-il, que vous puissiez vous accoutumer à ce bruit, car si un