Aller au contenu

Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/137

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
127
LES BARQUES MOURANTES

— Un soir qu’il faisait noir…

Éperdument,
Les Vents chantaient comme des cors
Sur l’entonnoir des ports :
« Virez, virez au large, vieilles prunelles lasses,
Virez au large des écueils, loin des sables perfides…
Virez sur l’infini, âmes épuisées, Barques mourantes,
Prunelles sans espoir !…
Vous qui souffrez de vivre et de si lentement mourir,
Prunelles assoiffées d’infini et d’espace,
Virez sur l’horizon cajoleur et fuyant,
Ô Barques qui tanguez parmi le remous noir,
Prunelles désolées, Barques mourantes !…
Vous qui flambiez au temps jadis
Hissant vos voiles blondes, à l’aurore,
Sur des jonchées de roses illusoires,
Virez, virez au large, virez sur l’infini ! »
Les Vents gonflés d’angoisse et de terreur