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Page:Marinetti - La Ville charnelle, 1908.djvu/71

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LES VIGNES FOLLES

Marchez plutôt, et priez en silence ;
emmitouflez vos corps grisants
dans votre chevelure, où vous pouvez cacher
les grappes succulentes de vos seins de raisin.
Hâtez vos pas sans bruit, répétez en cadence
avec moi les nocturnes litanies de la brise,
pour éloigner Satan qui se grise en tressant
ses doigts gluants de feu aux boucles de vos nuques…
Baissez la voix ! Plus bas… Et marchez trois par trois,
en vous donnant la main. Ne sortez pas des rangs…
Il faut que nous ayons atteint le monastère
avant l’Aurore, pour que les Vendangeurs
ne vous ravissent pas dans leurs doigts de pressoir.
Car ils voudront vider d’un coup vos seins gonflés,
et boire à même les blessures de vos corps.
Vous portez dans vos veines le vin sacré des Anges
que vous devrez répandre sur l’Autel du Seigneur !
Hâtez vos pas sans bruit ! et priez à voix basse.